...ou comment une grignote d'après-soldes se termine en apothéose gastronomique.
19h, avenue Pierre Premier de Serbie. La boutique Léonard ferme. Sur le trottoir, nous nous interrogeons. Rentrer ? Grignoter quelque chose ?
Pourquoi se poser la question, nous direz-vous ? Vous n’avez pas tort. Comment résister à l’appel de l’estomac quand, à deux pas, se trouve notre cantine de luxe ?
Comme souvent, nos plans de départ, toujours raisonnables, se retrouvent contrariés et déformés pour notre plus grand plaisir. Nous entrons au George V pour un plat sur le pouce dans le patio. Las, celui-ci étant complet, nous nous rabattons sur la Galerie. Pas de table disponible dans l’immédiat mais deux places au bar pour patienter nous tendent les bras. Mais alors que nous nous y dirigeons, ma Comtesse lance ingénument (goûtez l’ironie de la formule) « Et au Cinq ? ». Voici donc comment, un coup de fil plus tard, nous entrons dans le restaurant gastronomique de l’hôtel.
Eté oblige, la carte s’accompagne de deux menus de saison : le premier orienté vers les fruits de mer et le second qui fait la part belle aux produits du moment. Ce dernier, très alléchant, emporte la décision.
Le sommelier arrive et nous entamons une discussion animée sur le thème « bouteille ou sélection au verre ». La dite sélection s’impose lorsque Eric Beaumard, directeur du restaurant et vice-meilleur sommelier du monde décide de s’occuper de nous (à notre grand plaisir).
Avant d’énumérer les plats, je prie nos fidèles lecteurs de bien vouloir nous excuser à l’avance de l’absence d’illustrations photographiques de ce dîner mémorable. L’impromptu de la situation vous prive d’un précieux compte-rendu visuel. Sachez cependant que ce n’est que partie remise et que nous ferons amende honorable de la meilleure des façons, c’est-à-dire en retournant sur les lieux de notre forfait gastronomique.
Nous entamons donc le menu par les Tomates de Provence en millefeuille aux crevettes Obsiblue, sorbet tomate, brioche feuilletée citron/romarin. Le plat se présente sous la forme d’un cube composé d’une alternance de chair de tomate ferme et de crevette crue moelleuse. Le sorbet tomate est relevé au vinaigre balsamique. La brioche, servie à part encore tiède, est une petite merveille de légèreté et de finesse de saveur.
Accompagné par un Savennières Roche aux Moines 2006 étonnant du Domaine F.L.
Nous continuons par le Foie gras de canard des Landes rôti au poivre noir Sarawak, rhubarbe étuvée, fraises Mara des Bois au jus de sureau. Cuisson parfaite, un accord sucré/acide/salé qui fonctionne parfaitement et donne une impression de fraicheur onctueuse. Un très beau plat que nous n’attaquons pas immédiatement car, à notre surprise et celle des convives attablés alentours, le sommelier apporte des verres noirs… Au nez, le vin mystère me fait penser à un cépage rouge cueilli en surmaturité pour obtenir un vin naturellement doux, à l’image du grenache du Château Les Fenals. L’idée est bonne mais pas la provenance puisqu’il s’agit d’un Aleatico del Salento 2007 de la Tenuta di San Marzano. C’est doux sans être sucré et le compagnon idéal des fruits rouges.
Nouvelle surprise : alors que nous attendons nos plats principaux, nous voyons se poser une petite réglette au contenu familier : tartare d’ormeaux et coques d’un coté, bouillon de poule à la citronnelle de l’autre. L’explication arrive avec l’assiette qui l’accompagne. Eric Briffard, le chef des cuisines que l’on voit souvent posté au seuil de la salle, a remarqué nos yeux levés au ciel en signe d’extase et à décidé de nous offrir un de ses plats signatures. De son propre aveu, il aime les gens qui apprécient sa cuisine. Et nous sommes bon public !
Nous avons déjà évoqué ces ormeaux dans une publication antérieure. Rappelons seulement qu’ils sont toujours aussi fins et délicieux.
Seule ombre au tableau, Eric Beaumard dont la mise en place des vins est totalement chamboulée par cet extra imprévu, râle pour la forme en nous apportant un verre de Puligny-Montrachet du Domaine Carillon.
Ma Comtesse poursuit par un Omble Chevalier de source « des Plans », meunière aux herbes potagères, étuvée aux girolles/bigorneaux/bergamote. Une très belle préparation, dénuée d’arêtes ce qui la rend encore plus appréciable.
Pour ma part, il s’agit d’un Lapereau du Poitou accompagné de ratatouille et tapenade.
Coté vins, ma Comtesse hérite d’un autre verre de vin blanc. Nous sommes toujours aussi perplexes qu’auparavant. Plantage total puisqu’il s’agit du même Puligny. Honte à nous…
Double honte car je suis incapable de reconnaitre le pinot noir du Savigny les Beaune du Domaine Marconnet. Il faut revoir nos gammes de toute urgence !
Il en faut néanmoins plus pour nous empêcher d’apprécier le dessert, un Fraisier minute façon GV et crème glacée à la pistache. Ce dessert allie fraicheur et légèreté, bienvenues après de telles agapes, terminées en beauté avec le Jurançon Marie Kattalin 2005 du Domaine de Souch.
Que dire de plus ? Que les deux Eric, Beaumard et Briffard, font un travail remarquable que nous espérons voir couronner en février prochain (Monsieur Narret, si vous nous lisez…) et qu’il nous tarde de les rencontrer à nouveau pour d’autres expériences gastronomiques.
François
2 commentaires:
pour y avoir travaillé lors de la réouverture et avoir eu le plaisir de déjeuner au V également, je suis plus que convaincue de la perfection de ce déjeuner !
Merci de nous lire, ainsi que pour votre commentaire.
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