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Bienvenue à toi, aventureux surfeur, qui vient s'échouer en quête de sens gustatif. Ici tu trouveras des récits d'agapes, des notes de dégustations bacchiques et des adresses prometteuses compilées avec amour.

samedi 26 décembre 2009

Retour chez les ours


L’imminence de la fin d’année nous rappelle soudain que notre dernière migration vers la Brière date de 2008. Comme il ne sera pas dit que 2009 ne nous verra pas à la Mare aux Oiseaux, nous profitons du retour de notre Noël brestois pour faire un léger détour sur le chemin de la région parisienne.

Comme tous les ans à cette période, les oiseaux qui décorent le lieu migrent et laissent place aux ours. En guise de nouveauté, certains sont animés et nous accueillent en mouvement. Pourtant, dans le jardin, certains oiseaux sont restés : pigeons blancs, poules et deux magnifiques grues couronnées.

Vous le savez, nous choisissons rarement notre menu en deux minutes. C’est donc confortablement installés au salon que nous discutons âprement les différentes options qui s’offrent à nous : menu, carte, carte blanche, mix… Surgit alors le maître des lieux, Eric Guérin. Nous discutons un peu de l’année écoulée, du futur de la MaO (grands travaux en perspective) et de notre menu. Suivant nos souhaits et les suggestions du jour, nous nous mettons d’accord pour une sorte de menu dégustation surprise.

Crème d’oignons, sphère de seiche et pousse de lin doré, arrosé d’un bouillon d’oignons. C’est une petite mise en bouche pleine de subtilité et de douceur avant les trois petites entrées qui suivent.

Huîtres triple zéro à la plancha, épinards chinois et petits oignons « école hôtelière », brochette d’escargots et caramel à la fleur de sel en vinaigrette. Certes, l’intitulé est long mais tout y est. A droite, l’huître saisie est roulée dans une feuille d’épinard et posée sur un confit d’oignons. Au premier plan, les escargots, épinards et petits oignons reposent sur un caramel salé et très légèrement vinaigré. Cru/cuit, sucré/salé, c’est un jeu de contrastes dont celui terre/mer est une signature d’Eric Guérin.

Fines ravioles de potimarron, Saint Jacques et mangoustan, râpé de châtaignes et noisettes grillées. Les Saint jacques sont poêlées (à droite) et en tartare (à gauche) sous une fine tranche de potimarron. Si vous l’ignorez, le mangoustan est un fruit rond et violacé originaire d’Asie du Sud-Est. Sous son écorce épaisse se cache des quartiers blancs au goût très fin et légèrement sucré. Personnellement j’adore… et c’est au sein du tartare que s'en cachent quelques quartiers. Le mélange est magnifique. Le potimarron apporte juste une touche croquante au moelleux du tartare, les gouttes de châtaigne s’accordant plutôt avec la Saint-Jacques poêlée.

Demi-lunes de pommes de terre aux crevettes, ormeau cocktail, lait de poule parfumé aux cèpes et à la truffe blanche. La pomme de terre, tranchée finement, sert de raviole et est farcie d’un tartare de crevettes roses. L’ormeau (au premier plan) est de petite taille ce qui permet de ne pas le battre et de conserver un moelleux incroyable. Le tout est arrosé avec un lait de poule qu’on pourrait boire seul tellement il est bon et parfumé.

Pour ces entrées, nous faisons confiance à Olivier, le sommelier en second, qui nous propose un Vin de Pays d’Oc, la cuvée Classic 2006 du Domaine La Madura. C’est un sauvignon du Sud, dont nous découvrirons toutes les facettes au cours du dîner. Au départ peu expressif au nez, il présente une bouche vive et florale, ressemblant étrangement à un Muscadet. En se rafraîchissant, le nez devient plus floral et la bouche reste vive mais plus précise. Il est suffisamment versatile pour accompagner sans encombres les entrées.

Remplaçant à la patte levée un canard, arrive la chasse du jour : Sarcelle et poulpe confit à l’encre de seiche, shiitake laqué et riz « vénéré », trompettes et pleurotes. Sous son apparente simplicité, c’est un grand plat. Les saveurs sont bien marquées, parfaitement en place. La sarcelle est pour ainsi dire bleue, giboyeuse en diable, que le poulpe adoucit dans un accord de textures inattendu. Le riz noir est surmonté d’un shiitake laqué digne d’un point d’orgue.
Remarquez le subtil décor d’encre qui évoque une patte… de sarcelle.

A saveurs puissantes, vin puissant : Hermitage La Chapelle 2000 de Jaboulet. Le nez est expressif (fruits noirs), fin, racé. La bouche est pleine, équilibrée avec des tannins civilisés. Prenant de la température, il développe un coté giboyeux en phase avec le plat.

Fromage ou dessert ? Jugez plutôt… Chococroque blanc-bleu à la truffe. Sous la feuille de chocolat blanc se cache un mélange bleu des causses et truffe blanche. Parsemant l’assiette, balsamiques rouge et blanc, feuilles de chou de Bruxelles et tapenade de truffe noire. Un plat extraterrestre dites-vous ? Certes, osé s’il en est mais très bien dosé. En bouche, on attaque par le coté butyrique du bleu, elle s’épanouit sur un mariage entre beurré salé (le bleu) et sucré (le chocolat) et termine sur le chocolat blanc. L’amertume est apportée par les petites feuilles de chou, tempérée par les vinaigres. Quant à la tapenade, c’est en quelque sorte le grain de poivre qui réveille les papilles.

Beaucoup plus graphique (remarquez le décor de l’assiette), le Chococitron vert et basilic thaï. De gauche à droite : feuilles de chocolat à la mousse citron vert et basilic, ganache chocolat surmontée d’un biscuit sans farine citron vert et basilic, gouttes d’émulsion basilic/menthe et glace basilic. No comment… Comme son prédécesseur, c’est très bien équilibré et les différents composants de ce dessert permettent de combiner les saveurs. Le résultat est une bouche fraîche et revigorée après toutes ces agapes par la verdeur du basilic et de la menthe.

Constatons qu’Eric Guérin, en perdant son étoile en 2008, n’a pas perdu son talent et ce n’est que justice qu’il l’ait regagnée en 2009.

C’est repus mais guillerets que nous quittons ce havre de paix et de bonheur culinaire, en regrettant cependant, distance oblige, de ne pouvoir en faire notre cantine.

François

2 commentaires:

Easy kitchen a dit…

merci François pour ton message. j'espère m'y rendre cette année depuis le temps. ce menu est intéressant notamment la partie dessert assez surprenante.
Très bonne année à vous.

docadn a dit…

je n'y suis pas retourné depuis 2003, et cela à l'air encore plus appétissant(alors que c'était déjà bon à très bon).
Merci pour l'article et bonne année MMX à vous 2...
Cordialement