Last but not least...
Enfin !
Après une (trop) longue attente, nous pouvons enfin nous enfoncer au cœur des Corbières et toucher du doigt et des papilles la légendaire cuisine du non moins légendaire Gilles Goujon. Meilleur Ouvrier de France, couronné de 3 macarons pneumatiques, sa réputation n'est plus à faire. Et pourtant, elle se mérite cette visite car Fontjoncouse ne se trouve pas à la croisée des autoroutes. Une route (très) étroite serpente dans un paysage de rochers escarpés. Un chemin qui incite fortement à passer la nuit sur place. Ce que nous allons faire naturellement.
Et avec ça, vous prendrez bien une petite terrasse... à proximité de la piscine...
Après quelques longueurs dans une eau à température ambiante (30°), il est temps de nous reposer un peu et de nous préparer pour le diner.
Tous les convives se retrouvent en terrasse pour prendre l'apéritif et choisir son menu.
Au premier plan, à gauche, une bulle de pain soufflée à la crème de truffe. En haut, une crème de biju (autre nom du violet). A droite, une tarte de champignons, opaline et noisette. En bas, dans un cannelloni de pain de mie, une tielle sétoise.
Ma Comtesse part dans les agrumes avec un Gin Tonic composé du Gin "Collection de bigarades" de la Distillerie du Petit Grain et du Tonic Archibald à la gentiane et baie de genièvre.
Pour ma part, je prends un verre de Carignan blanc "C1617" des Vins d'Aristide Larrieu. Une bouche vive, droite et ample, avec une belle amertume.
Pour le diner, nous faisons le choix du menu surprise intitulé "Air de fête en Corbières" pour lequel j'ai, une fois n'est pas coutume, fait le choix du vin en amont. Mais nous en reparlerons...
Une huitre Tabouriech d'un calibre spécialement sélectionné pour Gilles Goujon qui recouvre un tartare d'huitre, elle-même recouverte d'oyster leaf, d'une gelée d'eau de mer et d'une perle de fumée de bois de hêtre. C'est l'accord de cette fumée et de l'huitre qui rend cet amuse-bouche extraordinaire.
Roger Vergé, illustre chef du Moulin de Mougins et mentor de Gilles Goujon, inventa le poupeton ou fleur de courgette farcie qui fit sa renommée. Pour lui rendre hommage, Gilles Goujon a interprété ce plat à sa façon en associant la courgette et le homard en carpaccio, en tartare avec légumes et mangue et, surmontant le tout, un sorbet de homard dans sa cage ouverte de fleur de courgette cristallisée. L'assaisonnement est une vinaigrette au homard. C'est une merveille de technique de MOF, aussi belle que bonne. La douceur de la courgette et de la chair de homard est relevée par la saveur puissante du sorbet et l'acidité de la vinaigrette. Je ne saurais dire si l'élève a égalé, voire dépassé, le maitre car je n'ai pas eu la chance de gouter la recette de Roger Vergé. Néanmoins la tentation est grande.
Allergie oblige, ma Comtesse déguste la langoustine en kadaïf servie sur un socle de semoule et coriandre dans un jus épicé. Ce plat, hérité des souvenirs magrébins de Gilles Goujon, est accompagné (au second plan) d'un tube de Mon Harissa, condiment épicé maison. Ce dernier exhale plus le gout du piment que son piquant. Un plat tout à fait dépaysant.
Acte I : l’œuf nu sur une purée de champignons et truffes.
Acte II : le sabayon truffé.
Acte III : la truffe râpée.
La surprise de ce plat, riche en saveurs, est le contenu de l’œuf, farci de sauce truffé. Autre surprise, comment trouver de la melanosporum en cette saison? La réponse est simple : en Tasmanie. Certes, le bilan carbone n'est pas excellent mais l'authenticité du plat est à ce prix. Un plat superlatif mais follement addictif.
Pour alléger (autant que faire ce peut) le palais, le plat est accompagné d'une briochine tiède, elle aussi truffée, et d'un cappuccino de jus de champignons à boire.
Le filet de rouget barbet, pomme bonne bouche fourrée d’une brandade à la cébette en « bullinada », rouille au safran
Prologue
Prologue
Prologue : Tout est en place...
Action : le bouillon de rouget est versé sur la rouille.
Épilogue... une version simplifiée (mais 3*) de bouillabaisse, très gouteuse et très safranée. Cuisson parfaite du rouget, très bel équilibre entre safran et bouillon très peu salé. Faussement simple et très efficace.
Il est simplement rôti et d'une grande tendreté. A ses côtés, une chartreuse de haricots verts aux cèpes poêlés en blanquette et un jus de veau à la nepita.
Après un superbe chariot de fromages, nous passons au dessert.
Dans une coque en sucre délicatement cassant, se trouvent un sorbet citrus bergamote et kumquat du Japon confit du Mas Bachès, une crème légère thym citron et une meringue croustillante. Une superbe déclinaison, fraiche et légère.
Notre menu n'aurait pas été complet sans une bouteille de vin. Dans la bible de l'établissement, j'ai trouvé une bouteille rare sur les cartes de restaurant : le Vin de France "La Carrée" 2013 de Henri Milan, 100% Roussanne. Un nez expressif et complexe qui va évoluer au fil de la soirée. Une bouche mature très équilibrée, harmonieuse, avec une belle évolution et un beau boisé. Un vin assez versatile pour se montrer à l'aise avec les notes boisées de l’œuf truffé, le safran du rouget et la nepita du veau. Excellent.
Il est temps de passer au salon...
Sous la collection de chartreuses, nous prenons une infusion digestive pour accompagner les mignardises.
Finalement, l'occasion est trop belle...
Je me laisse tenter par une Chartreuse verte de Voiron, période 56-64.
C'est une découverte pour moi. L'âge a donné des arômes inédits à l'habituelle liqueur verte : datte et figue séchée qui donnent à la bouche une structure un peu plus visqueuse pour ne pas dire liquoreuse. Je manque de repères pour la noter mais c'est tout de même un digestif plaisant pour finir la soirée.
Toujours dans l'idée de la découverte, j'exprime le souhait de faire découvrir une liqueur à ma Comtesse... à l'aveugle.
C'est également une découverte pour moi que cette liqueur de tomates de la Distillerie Cazottes. Évidemment, c'est loin de tout ce que nous avons déjà pu gouter mais c'est très intéressant.
Chaque 3* propose une expérience unique et celle proposée par Gilles Goujon est parmi les plus marquantes que nous ayons connues. Le lieu, l’hôtellerie, le service et bien évidemment la cuisine, tout est parfait et digne d'un tel niveau. Une fois de plus, nous regrettons que nous en soyons aussi éloignés. Pour une fois, nous sommes en accord avec la guide du pneu : l'Auberge du Vieux Puits mérite le voyage.
François
Post-scriptum : Le lendemain, sur notre terrasse privée...
J'aurais bien repris du cassoulet (cf. la petite cocotte rouge)..
A bientôt chef !!